Thermes Corentin

Cette thèse de géographie présente une recherche sur la production et le transfert de savoirs par les vignerons dans un contexte de changement climatique à fin d’adaptation. S’inscrivant dans le champ des études des pratiques professionnelles à travers des approches sensibles, ce travail explore les relations entre savoirs pratiques territorialisés et savoirs experts extra-territoriaux. L’analyse aborde pour cela la question centrale du terroir et du territoire comme élément dynamique dans la relation entre viticulture, vignerons et changement climatique. L’objectif est également d’identifier les formes d’adaptation en cours, qu’elles soient réactives, spontanées, à court-terme ou au contraire par anticipation sur une stratégie de moyen ou long-terme. Pour cela, les pratiques vigneronnes et les pratiques de recherche y ont été étudiées avec une méthodologie d’observation participante, basée sur des entretiens et des situations de mise en pratique qui ont lieu entre 2018 et 2023. L’approche méthodologique de cette thèse comprend notamment la réalisation d’un film documentaire « Les promesses de l’aube – des vignerons face au gel », qui retrace sur une année le parcours de vignerons dans leurs relations avec le changement climatique et l’aléa gélif, aléa dont les impacts sont accentués par le changement climatique. L’étude porte sur des territoires viticoles français : dans la région Centre-Val de Loire avec les appellations Bourgueil, Saint-Nicolas-de-Bourgueil, Sancerre et Quincy. Puis dans la région Sud avec l’appellation Gadagne-Côte du Rhône village et l’appellation Ventoux. Pour la région Centre-Val de Loire, la thèse s’est aussi adossée au Partenariat Européen pour l’Innovation (PEI) CLIMENVI « Intégrer le changement climatique dans les décisions des chefs d’entreprises viticoles pour les vignobles du Centre-Val de Loire ». La thèse s’est également inscrite dans le métaprogramme LACCAVE I et II « Impacts et adaptations à long terme de la filière viti-vinicole au Changement Climatique », porté par l’INRAE. Cette thèse montre la diversité et la richesse d’expérimentations et de nouvelles pratiques à fin d’adaptation avec une persévérance du monde viticole à produire du raisin et du vin. Dans les sites étudiés, la production de savoirs est essentiellement territorialisée, avec une dynamique à la fois collective mais aussi individuelle. Les notions de terroir et territoire quelque peu malmenées par le changement climatique y restent centrales. Toutefois, les orientations stratégiques individuelles ou collectives conduisent parfois à la rupture avec l’hégémonie de l’appellation viticole. L’étude des savoirs et des expérimentations montre un attachement renouvelé aux territoires et parfois un éloignement des institutions. Ainsi, dans cette période d’exploration des réponses apportées au changement climatique, on observe un foisonnement de production de savoirs. La nécessité de la mise en place d’outils de médiation et d’animation pour soutenir les démarches dynamisantes sur les territoires semble être un enjeu de taille pour faire parler la relation entre vignerons, viticulture et changement climatique.