Cet axe interroge les pratiques d’engagement en lien avec les processus de politisation et les rapports à l’espace et aux territoires. Faisant l’hypothèse d’un continuum entre des moments de conflits, de négociation, de participation voire de retrait, le questionnement porte sur l’articulation de différentes formes d’engagement : mouvements sociaux, associations, dispositifs participatifs, syndicats, partis politiques, résistances quotidiennes, mobilisations conflictuelles ou non, solidarités de proximité, etc. Il s’agit d’analyser les conditions et les modalités de l’engagement individuel et collectif, ainsi que ses rapports au droit, au territoire et à la politique. Cet axe s’intéresse ainsi à l’impact de différentes formes d’engagement sur la publicisation de causes, sur la construction des problèmes publics, sur la mise en œuvre des politiques publiques et sur l’exercice du pouvoir, pour comprendre leurs effets sur le temps long des processus de décision en termes de changement ou d’inertie. Quelles sont les conséquences de l’engagement sur la production de solidarités, la reconnaissance de droits et la transformation des normes, les transformations spatiales et le droit à la ville (ou à la ruralité), ainsi que les différentes sphères de la vie quotidienne (liens de voisinage, relations hommes-femmes, etc.) ? La réflexion portera sur trois questionnements :

– L’analyse du lexique de l’engagement

A partir de quand ce qu’on observe peut être considéré comme de l’engagement ? Comment saisir des formes de contestation qui ne sont pas toujours visibles ? Il s’agira de repérer les catégories mobilisées par les personnes ou groupes concernés, par exemple quand ils associent engagement et travail, et d’analyser la circulation des idées et des mots. Les catégories d’analyse mobilisées par les chercheurs (engagement, ordinaire, politisation, citoyenneté, émancipation, empowerment, etc.) seront interrogées, en retraçant l’histoire des concepts et en comparant les termes utilisés dans différentes langues étant donné le caractère international des terrains de recherche des membres de l’axe (France, Espagne, Italie, Allemagne, Turquie, Egypte, Mexique, Inde, etc.).

– Les relations entre engagement et politisation

La réflexion portera sur les formes de politisation des participants au-delà des seuls dirigeants, à travers l’observation de pratiques et d’espaces ordinaires, qui peuvent aboutir à des processus de montée en généralité et/ou de conflictualisation, comme c’est le cas par exemple dans des mobilisations d’habitants ou des mouvements d’Indignados. On s’interrogera sur les facteurs de politisation et les déterminants du passage à l’action, comme les moments de crise et de rupture. En prenant en compte le temps dans l’analyse de l’engagement, seront étudiées les trajectoires de politisation et de professionnalisation, à partir des compétences et des processus d’apprentissage, mais aussi de désengagement.

– Les espaces et les effets territoriaux de l’engagement

La dimension spatiale des mobilisations sera considérée à partir de la diversité des espaces investis concernant notamment les conflits environnementaux de proximité. Si l’engagement est, dans certains contextes, intrinsèque à la pratique de l’espace public, il peut aussi se déployer dans des espaces privés ou semi-publics comme des associations de quartier ou des centres sociaux. Les relations à ces différents types d’espaces seront interrogées comme contextes mais aussi comme catalyseurs de l’engagement, à travers l’analyse des luttes pour l’appropriation des espaces publics urbains et les processus de valorisation de certains territoires. Une réflexion transversale sera finalement menée sur les formes d’engagement des chercheurs : faut-il s’engager pour étudier l’engagement ? Comment le chercheur peut-il coopérer à des processus de transformation sociale ?